L’autogestion : théories et pratiques
Retour aux sources
"Le terme d’"autogestion", pourtant devenu usuel de nos jours, quelle qu’en soit l’acception, ne date cependant que d’une cinquantaine d’années... Entré dans le dictionnaire en 1960, son usage est alors presque inexistant. Il devient donc légitime, de s’interroger : d’où vient ce terme et quels sont ceux qui ont contribué à sa popularisation ? C’est sur les traces de Georges Gurvitch que nous trouverons des éléments de réponse. Ce sociologue, né en 1884 dans le sud de la Russie, a eu un parcours bien particulier. Contemporain de la révolution russe, il y défend la construction d’un socialisme fondé sur les soviets et les conseils d’usine. L’évolution, impulsée par Lénine et les bolchéviks, vers une étatisation et une bureaucratisation de la révolution, donc vers une mise à mort des conseils et soviets, pousse Gurvitch à quitter la Russie en 1920. Après un passage par l’Allemagne et Pragues, Gurvitch arrive en France, où il restera jusqu’à sa mort, en 1965. Ce qui nous intéresse ici, c’est la pensée de ce théoricien révolutionnaire : sa volonté de concilier collectivisme et individualité. Et c’est en associant Proudhon à Marx qu’il élaborera ses propres conceptions, rejetant ainsi communisme autoritaire comme libéralisme individualiste. [...]"
Une vision anarchiste
"Bien d’autres auteurs ont donné leur définition de l’autogestion, comme Cornélius Castoriadis en 1979 ("Toutes les décisions sont prises par la collectivité qui est, chaque fois, concernée par l’objet de ces décisions. C’est à dire un système où ceux qui accomplissent une activité décident collectivement ce qu’ils ont à faire et comment le faire"), ou encore Victor Fay en 1966 ( "Gestion pour soi-même, ce qui implique la disparition des distinctions entre dirigeants et dirigés, donc la possibilité pour les individus de s’organiser collectivement tant dans la vie sociale que dans l’appareil productif"). Nous ne listerons pas toutes ces définitions, activité longue et fastidieuse qui nous éloignerait de notre problématique, mais il est cependant utile, de notre point de vue de nous arrêter sur la vision anarchiste de l’autogestion, puisque nous avons vu que plusieurs théoriciens libertaires en étaient à l’origine (Proudhon ou Bakounine, et nous verrons les syndicalistes révolutionnaires, comme Pouget ou Pelloutier, ou anarcho-syndicalistes, comme Besnard, Puente, etc.). [...]
"La construction d’un outil syndical autogestionnaire est un combat qui n’a rien de linéaire, il est marqué par des avancées, des reculs, qui, a des degrés divers, témoignent des rapports de force entre les classes, de la progression ou de la régression de la conscience de classe. Lors des périodes d’offensives sociales, notre syndicat connaît des embellies ; en situation de reflux du front social, nous pouvons enregistrer des revers qui alimentent parfois des débats ou pratiques portant sur la nature de l’organisation à construire. Cela est le propre de la CNT comme de toute forme d’organisation collective, aujourd’hui comme hier. Aussi, nous avons connu, nous connaissons, des débats contradictoires, des crises dont la résolution, selon les orientations choisies, conditionne soit le maintien du syndicat sur une perspective ayant, malgré les adaptations nécessaires, une continuité historique, soit une rupture avec son histoire, ses objectifs. [...] "La CNT est porteuse d’un projet de transformation révolutionnaire de la société fondé sur la capacité des exploités et des opprimés à autogérer la production, et la distribution des biens et des services en s’appuyant sur la logistique syndicale et en se dotant de ses propres organes de pouvoirs issus de l’auto-organisation des travailleurs. Ce projet ne s’arrête pas aux frontières de l’hexagone mais s’inscrit dans une problématique internationaliste. Cette perspective met le mouvement social au centre de la lutte collective, refusant les médiations politiques qui prétendent représenter les exploités et conduire leur destinée.
De cette conception globale du combat à mener, fruit de l’expérience historique et international du mouvement ouvrier et non lubie idéaliste, qui détermine la finalité de notre organisation, découle une approche des tâches du syndicat sur le terrain social et un point de vue sur l’organisation syndicale à développer, outil qui se doit d’être en phase avec les moyens et les buts de notre action."
Extraits de
http://www.cnt-f.org/editionscnt-rp...
à lire aussi :
https://www.monde-diplomatique.fr/2...
Alternative libertaire, Une idée neuve : l’autogestion, numéro spécial, novembre
2003.
Alternative libertaire, L’autogestion une idée toujours neuve Paris/Montréal, Alternative
libertaire, 2005.
Castoriadis (Cornélius), Mothé (Daniel), « Autogestion et hiérarchie », CFDT Aujourd’hui,
n° 8, juillet-août, 1974.
Castoriadis (Cornélius), Autogestion et hiérarchie, Le Grain de Sable, 2007. CFDT-Hacuitex,
Construire dès aujourd’hui la démocratie socialiste de demain, Hacuitex, aoûtseptembre,
1968.
https://www.syllepse.net/lng_FR_sru...
à écouter :
https://www.mixcloud.com/syndicat_C...